Ces dames du palais Rizzi

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Edition : Fleuve Noir

Dépot légal : novembre 1994

Imprimeur : Société Nouvelle Firmin-Didot, Mesnil-sur-l'Estrée

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Ces dames du palais Rizzi backGrand format (15,5X24) de 248 pages.

Dédicace : Au comte et à la comtesse
Frigerio Bonvicino, dont les
enfants sont devenus les miens.
Affectueusement.
San-Antonio

Dans l’ombre de la vieille bâtisse italienne, il se passe d’étranges choses. Cela commence par un air de mandoline et cela finit en cauchemar. Mais qu’importe la démesure des passions. L’essentiel n’est-il pas que Jérôme Deuilh aille jusqu’au bout de son terrible voyage parmi les mystérieuses créatures qu’on appelle « ces dames du palais Rizzi » ?

Une demeure d’Italie, un labyrinthe dément, un cauchemar signé Dard.
Sans Frédéric Dard, nous n’aurions peut-être jamais rien su de Cuneo, une petite cité du Piémont, au confluent de la Stura di Demonte et du Gesso. Il y a situé son dernier roman, «Ces dames du palais Rizzi», un San-Antonio tendance dure, qui, une fois refermé, nous laisse l’illusion d’en connaître tout. Comment oublier d’ailleurs les sombres demeures mitoyennes et les chambres successives où il piège Jérôme Deuilh, écrivain français, divorcé, la quarantaine migraineuse, débarquant en ville pour étudier l’architecture du fascisme? Ces lieux, et les personnages convulsifs qui les hantent contribuent à la forte prégnance d’un cauchemar irréversible.
Dard est d’abord un artisan qui fignole en jubilant les linéaments de ses intrigues. Il les développe ensuite jusqu’aux limites du supportable. Le critique, complice, s’interdira d’en dire trop, mais, sans déflorer l’essentiel, il peut citer plusieurs des apparitions et menaces qui ponctuent cet impeccable labyrinthe: une vieille logeuse aux allures de «Folle de Chaillot», un chat blanc, une touriste allemande nympho, un serviteur muet, une mandoline obsédante, une très jeune victime, un palais vénitien, une grotte vertigineuse, pleine de chauves-souris, un oncle obèse…
Rien qui ne soit frappé, ici, du sceau de la démence ou de l’angoisse. On frôle parfois les excès du «hard» et du «gore», corrigés aussitôt par un appétit d’innocence, une tristesse diffuse et la prémonition d’un désastre intime qui marquèrent jadis les Dard les plus noirs. Les pulsions érotiques et meurtrières qui encerclent progressivement les «Dames» fatales de Cuneo évoqueraient presque la trame de «Sandra», le plus vénéneux des films de Luchino Visconti, où une ville italienne, Volterra, et une bâtisse ancienne enchâssaient le secret honteux d’une famille. La comparaison indique à quelle hauteur nous situons ce livre somnambulique. Avec lui, Dard porte le deuil une nouvelle fois et brûle à sa manière de l’inconvénient d’être né.
Raphaël Sorin de l’Express

Sophocle en gondole
Jérôme Deuilh arrive à Venise. Tourisme ? Villégiature ? Affaires ? On n’en sait rien encore. Il erre dans les rues de la cité des Doges, en proie à de lancinants maux de tête et traînant derrière lui un passé mystérieux dont il n’arrive pas à se défaire. Au gré de ses pérégrinations, il tombe sur une vieille bâtisse imposante, le Palais Rizzi, et sur ses habitantes, la signora Conte et surtout, la sublime Giulietta, véritable madone de pureté dont il tombe aussitôt amoureux. Dès qu’il la voit, il en est certain : Giulietta est un signe de la providence, un ange tombé du ciel qui sera sa rédemption, son salut. Mais encore faut-il que la jeune femme soit elle-même sensible au charme du Parisien, et surtout, qu’elle puisse échapper à la vigilance de sa garde-chiourme et aux étranges manigances qui se déroulent entre les murs de ce palais séculaire.
Pour qui ne voudrait lire qu’un seul roman de Frédéric Dard (car en dépit de la signature San-Antonio, il s’agit bien d’un roman de Frédéric Dard) pour se faire une idée de l’œuvre de cet écrivain polymorphe, c’est assurément Ces dames du palais Rizzi qu’il faut ouvrir, chef-d’œuvre dardien par excellence. Et vite.
Toutes les obsessions de l’écrivain, tout son savoir-faire et sa technique se retrouvent dans ce titre. La construction, tout d’abord. Cette mécanique implacable, véritable tragédie antique moderne. Cette issue inéluctable oppressante, étouffante. Le péché originel, révélé dans un twist magistral, qui condamne le personnage avant même que l’histoire n’ait commencé. Sa lutte vouée à l’échec, ses soubresauts pathétiques contre un fatum sans pitié. Vous qui ouvrez ces pages, abandonnez toute espérance… Frédéric Dard fut aussi un dramaturge aguerri, et son art consommé de la tension tragique se retrouve à chaque page de ce roman.
Autre caractéristique omniprésente dans son œuvre, érigée ici en clé de voûte narrative, le thème de la pureté saccagée, de la beauté souillée, violée. Difficile de trop en dire sans dévoiler un coup de théâtre majeur du roman, mais Jérôme Deuilh, à l’instar du Président Tumelat (Y a-t-il un Français dans la salle ?), se voit offrir une seconde chance en la personne d’une jeune femme à l’apparente pureté angélique. Mais comme si le bonheur était impossible en ce bas monde, comme si la rédemption était refusée d’avance, le destin, toujours lui, prend un malin plaisir à bafouiller la beauté et la vertu. Et le moins qu’on puisse dire est que dans ce Palais maudit, l’innocence est viciée de la plus odieuse des manières, dans des scènes d’une puissance évocatrice rarement atteinte par Frédéric Dard.
C’est un roman d’une cruauté sans nom, sadique, à la mécanique diabolique, maîtrisé de bout en bout. Qui flatte nos bas instincts, nous rend voyeurs complices d’une odieuse machination, spectateurs d’un viol insoutenable, celui de l’espérance.
C’est un roman qui prend au coeur, à l’âme, aux couilles. C’est un chef-d’œuvre incontournable.
Citation
Pardon, chuchote-t-il, je suis venu troubler votre existence. Elle coulait sans bruit. Et puis je soulève des pierres sous lesquelles grouillent les cancrelats. Malgré ce que je viens d’apprendre, je te veux, petite. Je te veux ! Et je passerai le restant de ma vie à essayer de réparer ta jeunesse ravagée.
Rédacteur: Maxime Gillio dimanche 04 novembre 2012

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