La vieille qui marchait dans la mer

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Edition : Fleuve Noir

Dépot légal : novembre 1988

Imprimeur : Société Nouvelle Firmin-Didot

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La vieille qui marchait dans la mer backIllustrateur 1er plat: Pascal Vercken
Prix: 94F
Dédicace: A Founi GUIRAMAND,
qui a suivi la course de ce livre à la jumelle,
Et qui l’a rejoint,
Avec ma tendresse,
SAN-ANTONIO

Citation:
« L’habit d’un arlequin n’est pas plus
varié dans ses nuances que l’esprit
humain ne l’est dans ses folies. »
Gustave Flaubert
(Mémoires d’un fou)

Lady M. est une championne de l’arnaque. Depuis toujours, elle plume avec finesse et élégance les plus célèbres magnats de la planète, les plus riches gogos mondains, non sans les avoir laissés se rouler à ses pieds. Car Milady fut une formidable bête d’alcôve. Ses exploits sont contés par le menu au cours des impudiques confessions qu’elle adresse au Seigneur. Mais ne jugeons pas trop vite : plus que cupide, Lady M. est une artiste. Aujourd’hui, elle parcourt le monde au côté d’un ancien diplomate roumain. Il fut son amant, il est resté son complice. Seulement voilà, Lady M. vieillit. A 85 ans, il lui faut désormais prendre appui sur une canne, marcher dans la mer pour calmer l’arthrose qui la martyrise. C’est là qu’elle rencontre Lambert. Un plagiste paresseux, désoeuvré, qui ne sait que faire de sa jeune vie. Soixante ans les séparent. Qu’importe ! Milady décide de prendre le godelureau sous son aile et d’en faire son égal – à défaut de pouvoir en faire son amant. C’est le début d’une initiation fantasque et délirante. Lady M., refusant de se laisser lentement réduire par la vieillesse, inspirera une passion fanatique à son jeune élève. Et leurs deux destins s’imbriqueront à merveille : elle l’arrachera à sa médiocrité, il la gardera en vie. Mais lequel des deux est l’infirme ? Les escrocs écumeront l’Europe, déjoueront les détectives en tous genres, s’attaqueront même à la Mafia. L’histoire, ici, est à double fond. Sous le vernis de l’aventure, Dard décrit les maléfices de l’âge : le jeune Lambert arrive dans la vie de Milady à l’heure de la fermeture, lorsque l’abjecte décrépitude a déjà fait son oeuvre.
Pour raconter cela, Frédéric Dard se hisse au niveau qu’espèrent atteindre une fois dans leur vie tous les écrivains. Il mêle à cette odyssée extravagante et cocasse le déclin inexorable et terrible d’une femme qui fut la beauté même et retombe, peu à peu, en enfance. La pire des fins, peut-être, pour qui a converti sa vie en fête. Mais, surtout, il porte ce récit désespéré par une écriture sublime, où les effets de vocabulaire sont autant de formules qu’il nous faudrait retenir.
Article de François Busnel dans www.l’express.fr

Curiosité : Une ligne ayant été oubliée en page de la page 105, cela a donné lieu à un erratum de l’ éditeur.
erratum

 

 

 

 

 

 

 

Ce roman est considéré comme l’un des chefs-d’oeuvre de Frédéric Dard et a donné lieu à de nombreuses critiques, toutes positives, que vous trouverez ci-dessous :
Très grinçant!
j’ai voulu lire ce livre car j’avais entendu que c’était un des meilleurs des San-Antonio et je ne connaissais pas du tout cette série.
Ce livre raconte l’histoire d’une octogénaire qui a passé sa vie à arnaquer les gens et collectionner les amants, et qui décide de prendre un jeune homme sous son aile pour lui apprendre l’arnaque.
Malgré le langage grossier et cru de l’auteur il y a certaines tournures de phrases très recherchées et l’auteur arrive à allier grossièreté et poésie ce qui relève du tour de force.
Quant à l’histoire, elle est très rythmée et on ne s’ennuie pas une seule seconde. L’histoire se déroule calmement mais très sûrement jusqu’aux dernières révélations.Un roman emballant et jouissif
Critique par Soup34, le 11 juillet 2010 (Inscrit le 30 septembre 2007, 34 ans)

Il s’agit d’un roman publié sous le nom de San-Antonio, mais hors série et ne se situant pas dans l’univers du commissaire. Il réussit à allier l’univers des San-Antonio (truculence, vulgarité, amour de la langue française, audace, univers « surréaliste ») avec un côté plus réaliste, plus psychologique, plus dramatique qui m’a fait penser au « Monte-charge » et la fusion de ces univers donne un roman qui n’hésite pas à alterner des passages d’une vulgarité à peine soutenable et une poésie qui en atténue l’effet.
Ce roman est aussi une réflexion sur la nostalgie, le temps qui passe, la vieillesse, la complexité d’une personne dont les nombreux mensonges qu’elle se raconte ne suffiront pas à effacer son passé. San-Antonio avoue lui-même que c’est l’un de ses romans les plus grinçants, lui qui ne voulait raconter que l’histoire cocasse d’une vieille arnaqueuse qui se choisit un successeur pour le former à l’arnaque avant de raccrocher va (beaucoup) plus loin que cette idée de départ, d’ailleurs le côté arnaque du roman est relégué au second plan par l’évolution de la relation Lady M. (dont on ne cerne la vraie personnalité que vers les derniers chapitres)-Lambert. Un roman policier? Une histoire d’amour improbable? Un conte grinçant et immoral? Un drame humain? Non !!!! Tout ça à la fois et surtout un chef d’oeuvre de la littérature et le chef d’oeuvre de Frédéric Dard.
Critique par Killeur.extreme (Genève, Inscrit le 17 février 2003, 33 ans) – 14 septembre 2010

Lambert est un jeune plagiste qui travaille dans un hôtel en Guadeloupe. Tous les matins, il emmène Lady M, une très vieille dame extravagante couverte de bijoux, marcher dans la mer pour soigner ses rhumatismes. A la fin de chaque promenade, celle-ci lui glisse un billet de 500 Francs dans son slip de bain. Lors d’une de ces balades thérapeutiques, Lambert parvient à subtiliser l’émeraude de la vieille. De ce larcin, naît une histoire d’amour entre ce couple improbable ; Lady M prend Lambert sous son aile et le forme à l’arnaque. La vieille est une richissime truande qui opère avec son fidèle et vieux serviteur, Pompilius, un ancien diplomate roumain. Elle a fait le voyage en Guadeloupe pour extorquer de l’argent à Masurier, un riche entrepreneur lyonnais marié à l’héritière d’une grande famille conservatrice, qui passe ses vacances aux Antilles avec sa maîtresse et son fils. Sous la menace, elle obtient quatre millions de Francs Suisses.
De retour à Marbella, à la Villa Carmen, un de ses nombreux points de chute, Lady M prépare un nouveau coup ; elle compte voler le diadème que le prince Mouley Driz, son voisin, veut offrir à sa fille, lors d’une réception réunissant tout le gratin de la Costa del Sol. Elle envoie Pompilius à Paris pour faire un double du bijou, mais c’est Lambert qui commet le larcin. En provoquant un court circuit à l’aide d’une fourchette à dessert, il subtilise le diadème ; il se débarrasse négligemment du couvert dans un cache-pot. Le prince s’aperçoit du vol et engage un détective anglais qui trouve aussitôt la fourchette avec les empreintes de Lambert. Pour sauver son jeune protégé, Lady M n’hésite pas à accuser le vieux Pompilius, qui selon elle, est atteint depuis peu de cleptomanie. Humilié, ce dernier se suicide. Dès lors, la vieille commence à avoir des absences et les traumatismes liés à son enfance ressurgissent. Ce début de gâtisme compliquera sa dernière opération contre la Cosa Nostra à New-York.
La vieille qui marchait dans la mer est considéré comme le chef-d’œuvre de Frédéric Dard.
Le personnage principal, Lady M, possède un côté méphistophélique ; il est en quelque sorte, un savant mélange de la Marquise de Merteuil de Choderlos de Laclos et de Vautrin de Balzac, auquel il faut ajouter toute la savante perversion du Marquis de Sade.
Frédéric Dard fait de Lady M un véritable personnage théâtral tant par son allure physique (une vieille momie asexuée fardée à outrance et recouverte de bijoux comme lustre d’opéra ; cf Séraphita de Balzac) que par son jeu et ses différentes interprétations auprès des gens qu’elle vole ou de Lambert. Elle est un vrai caméléon qui change à tout moment de rôle. Cette duplicité permet au narrateur d’envisager plusieurs niveaux de narration, notamment les très réussis dialogues intérieurs, au cours desquels la vieille se confie sans retenu au Seigneur.
Lady M cache mille et une histoires, comme les rides qui couvrent son visage et ce n’est qu’à la fin, lors de ses absences, que le lecteur peut déceler sa vraie personnalité. La construction narrative donne au roman un aspect psychologique et dramatique fort intéressant et abouti.
Le roman, truffé de références littéraires (textes ou personnages), est également une réflexion sur l’écriture et sur la fiction ; les nombreuses mises en abîme du discours narratif donnent le vertige. San Antonio nous lâche dans un labyrinthe borgien où l’on se perd dans les différents degrés de narration ; la reconstitution de la vie de Lady M est comme un palimpseste que l’on gratte pour parvenir à la version d’origine, mais tout ce qui la concerne est factice ; chez elle, le faux est un moment du vrai, contrairement à Debord.
Frédéric Dard ne s’est imposé aucune contrainte morale, mais l’esthétique propre aux San Antonio est de mise : toujours aussi truculent, le style est direct et vif, précis et drôle. Les dialogues entre Lady M et Pompilius sont souvent jouissifs, on y décèle un rythme et une poésie du grotesque et du grossier.
La vieille qui marchait dans la mer est un roman amer, grinçant, qui peut paraître parfois dérangeant, mais qui est bien plus profond qu’il n’y paraît, quand on se donne la peine de creuser cette comédie humaine magistralement menée qui reflète le grand théâtre du monde.
Critique par http://faranzuequearrieta.free.fr

A la base, ce livre conte l’histoire d’un passage de témoin dans l’art de l’arnaque entre une vieille dame Lady M. et une jeune recrue Lambert.
Cela commence de façon gentillette, enfin presque, avec le vol de la bague de lady M. par le jeune Lambert.
Lambert offrant une promenade à lady M., l’invite à quelques caresses aquatiques qui baisseront la garde de la dame et lui permettront de dérober ni vu ni connu je t’embrouille ,la bague !
Lady M. est, dès lors, emberlificotée, sous le charme de ce jeune éphèbe, c’est décidé elle en ferra son héritier ! Son but, en faire un as du chantage, un voleur hors pair ,doublé d’un amant somptueux. De quoi avoir le beurre, l’argent du beurre et le cul de la fermière enfin plutôt la queue du fermier !
Mais je ne vous ai pas encore parlé du compagnon de lady M. , celui qui était là bien avant l’arrivée du jeune plagiste Lambert. Cet homme là, ce second rôle si important, c’est Pompilius Senaresco !
Je l’ai adoré ce personnage, dont le prénom, tout un poème ,rime avec le cunnilingus, art dans lequel il excelle ! Ah Pompilius !!! Extrait de sa description par Lady M.
« Seigneur quel artiste vivant ! La vie de cette ganache est un espèce de danse de maintien. Et dire qu’il est roumain ce con, donc un peu métèque ! Pourquoi n’en avez vous pas fait un Lord anglais, doux Seigneur ? C’est fait pour aller chasser la gousse en Ecosse, ce machin-là, au lieu de chassez la petite pétasse à culotte douteuse dans les brasseries et les salons de coiffure ! Des manières pareilles, c’est un don du ciel ! Je lui dois beaucoup , car il dore mon blason, le vieux gâteux. »
Je vous avais prévenu dans un San-Antonio on parle de cul c’est ainsi, si vous rougissez ou êtes gênés par les gros mots alors les SA ne sont pas des livres pour vous…
Néanmoins vous pouvez tout de même essayer, car finalement et c’est tout l’art de Frédéric Dard , il transforme tous ces vilains mots en poésie !
Extrait ou petit florilège pouvant servir en cas d’énervement :
« La vieille (Lady M.) partit en avant et s’affala sur le sol si malencontreusement que le mancheron de sa béquille lui meurtrit durement la figure. Un hématome bleuit immédiatement sa pommette tandis que son oeil droit enflait à toutes allures à des proportions alarmantes. Les deux hommes s’empressèrent de la relever, mais, plus vexée encore que meurtrie, elle gigotait comme une diablesse en les injuriant l’un et l’autre (Lambert et Pompilius) avec vigueur, et un vocabulaire de vivandière, les traitants de sales cons, de lopettes, d’enculés-de-leurs mères, de foireux, de foies blancs, de dégueulis d’ivrogne, de diarrhées vertes, de fesses de rats malades, de figures de culs, de pourritures, de sombres salopes, de débiles mentaux, de bouffeurs de chattes sales, de masturbés encéphaliques, d’eczémas purulents, et puis encore d’enculés. »
Cette lecture en fait va très loin dans les scènes dans les mots ,mais au fond, c’est aussi un livre très très noir … Plus je repense à ma lecture, plus je me dis qu’elle traite avant tout de thèmes forts et pas très rigolos : la vieillesse, les traumatismes d’enfance, la beauté éphémère, la vacuité de l’existence la maladie et la mort.
San-Antonio ne nous épargne rien, je ne peux tout dire sans vous dévoiler l’histoire mais assurément celle-ci est un vrai conte noir ! Ne croyez pas trop rire en lisant ce titre là, préférez les titres avec Bérurier !
L’auteur à sans doute mis dans son œuvre beaucoup de ses peurs, beaucoup de peurs que tout un chacun éprouve …
Et l’auteur étant désormais de « l’autre côté » j’espère qu’il y est bien et qu’il ne rôtit pas en enfer avec tous les blasphèmes proférés… ! Remarque l’enfer est peut-être plus sympa …
C’est un bon livre, mais vraiment je vous avoue il m’a remué les tripes et presque mis mal à l’aise. Pas à cause du vocabulaire et du style de l’auteur, mais réellement dans les thèmes abordés …
Pourtant l’auteur essaye d’en rire par les dialogues de son héroïne avec le Seigneur, ces dialogues rythmant les chapitres et permettant de découvrir les pensées non censurées de Lady M.
Extrait :
« Ah ! Comme vous vous bitez royal, Seigneur ! Chapeau ! La vie nous parait bien étale, mais au dessous de sa surface riante un courant de chasse d’eau nous emporte ! Me voilà, balayez par la trombe Jacob-Delafon, près de la fosse d’aisance, de la fosse commune, Seigneur. Mais je lutterai, ne vous y trompez pas ! Flèche de tout bois ! Déterminée, ardente !  »
Je vais donc essayez de clore mon avis, car je m’épanche, je m’épanche sur cette lecture à n’en plus finir … Or, tout à une fin …
Je vous conseille de lire ce San-Antonio mais si vous souhaitez du plus léger, prenez un Bérurier !
D’ailleurs je pense que je poursuivrais ma découverte plus avant en piochant dans cette très longue bibliographie !
Et puis je suis aussi très curieuse de l’adaptation au ciné de cet opus ! Je suppose que Michel Serrault campe un Pompilius superbe ! Je me demande aussi comment les dialogues en voix off entre lady M. (Jeanne Moreau) et le Seigneur sont retranscrits !
Bref queue de lecture en vue ! Bien du plaisir amis lecteurs !
Les curiosités de Didi dimanche 29 août 2010

Mon premier San-Antonio (donc Frédéric Dard), mais sans le commissaire homonyme, ni Bérurier et ses potes que je ne connaissais de toute façon que de réputation.
Extraordinaire premier chapitre : où l’extravagante, richissime, et très vieille Lady M. se promène les pieds dans l’eau, au bras d’un jeune éphèbe mal dégrossi, sur une plage des Caraïbes — comment elle décide de faire l’“éducation” du mignon dans plusieurs des sens du terme — comment elle l’invite à la suivre pour faire partie de sa vie de grande aventurière.
Le dernier chapitre n’est pas mal non plus : où la boucle est bouclée — où Lambert passe du statut d’”invité” cynique de Lady M. à celui de tendre protecteur attentionné — où Lady M. lâche enfin prise, se laisse aller au gâtisme et devient pour le pire, “la pensionnaire” de son “éternel invité”.
Entre les deux, le début et la fin, comme dans un sandwich trop riche, ça dégouline de morceaux de bravoure et de rebondissements scénarisés jusqu’à la caricature.
Ne voulant pas que l’on pense que je suis une petite nature devant les nourritures littéraires un peu grasses, je me suis vaillamment accrochée jusqu’à la fin (page 332), et je n’ai pas regretté même si les premières pages m’avaient fait miroiter plus de finesse et d’originalité dans l’ensemble.
Dans La vieille il y a plusieurs romans, pour plusieurs lecteurs.
Moi j’aurais volontiers laissé tomber les méticuleux montages d’arnaques dignes de Mission Impossible, et je n’aurais gardé que les deux “couples” (Lady M./Lambert, Pompilius/Noémie) et leurs empoignades, en virant au passage l’attendue scène d’échangisme qui n’apporte pas grand-chose à mon avis.
Un peu too much donc, avec quelques personnages et tableaux bien peints, mais inutiles à mon goût.
L’idée de génie de ce roman, c’est le dédoublement des deux personnages principaux : Lady M. et Lambert.
Chacun d’eux possède sa propre voix intérieure qui lui permet de “lâcher la vapeur” en s’adressant intimement à un interlocuteur bien choisi qui le comprenne.
Lady M. s’adresse à Dieu, sans châtier son vocabulaire. Son jardin secret, son coin pour se ressourcer, c’est Dieu qui est dans sa tête et à qui elle parle, dit-elle.
Lambert qui ne “sent pas Dieu”, a choisi de prendre Lady M.(sa Milady) secrètement à témoin de ses pensées et de ses fantasmes.
La distinction et la délicatesse n’étant pas des attitudes qui leur soient naturelles, à l’un comme à l’autre, il leur faut passer par cet exutoire pour ne pas se trahir en (bonne) société, tout en restant fidèles à leurs vraies racines. Pour chacun d’eux, cette sorte d’auto-confession libératoire intérieure est le moyen de mettre leurs sentiments à nu.
C’est un peu comme si Dard-Shiva jouait la partition de son roman à quatre mains… Le système des monologues intérieurs s’intercalant dans les dialogues “sonores” est original et particulièrement réussi, stylistiquement.
Le summum de la virtuosité est atteint à la fin du roman : la pauvre Milady perdant le sens de son intériorité, raconte à trois reprises, à voix haute et dans des termes presque identiques, le terrible souvenir de petite enfance qui est à l’origine du secret de toute une vie de non-dit.
J’aimerais bien savoir : comment ce roman fut-il reçu en 88 ? Les fans de San-A ont-ils été surpris ? Déçus ? Enthousiastes ? Que disaient les critiques littéraires ?
A cette époque, il n’y avait pas encore de blogs de lecteurs, qui comme on sait aujourd’hui, à de rares exceptions près (je salue Daniel Fattore !), sont des blogs de lectrices.
Je me trompe peut-être, mais je perçois que le lectorat “de masse” de San-Antonio était alors, et est encore aujourd’hui, très masculin, voire macho.
Mais dans La vieille qui marchait dans la mer, il y a la révolte, puis le désespoir et la résignation devant le vieillissement, et ça nous touche, nous les ladies !
Et cela me touche que cela soit un homme, et que ce soit San-Antonio, qui décrive cet état d’esprit avec une telle force et une telle précision. Car c’est Lady M., son personnage féminin âgé qui est le plus juste et le plus beau dans ce roman, jusque dans son outrance.
Les pages à la fin du roman, dans lesquelles Frédéric Dard décrit Milady commençant à perdre ses repères et à sombrer, sont terriblement véridiques pour qui a assisté de près au naufrage d’un être proche. Je me suis dit qu’écrivant La vieille à plus de soixante ans, Frédéric Dard vivait sans doute cette épreuve au quotidien pour la décrire ainsi de façon si précise et si poignante : sa mère, peut-être ?
“ Chaque jour me tue et les jours de mon âge sont plus meurtriers que les jours des êtres jeunes. “
jeudi 09 septembre 2010 le blogue de Tilly dans Livres, Weblogs | Lien permanent

De San Antonio, je ne connaissais jusqu’alors que le nom/ la réputation sans vraiment savoir de quoi il retournait… Je connaissais pourtant le personnage qu’était Frédéric Dard pour l’avoir vu/entendu dans des émissions et j’appréciais l’homme et sa façon d’être, de s’exprimer…
Il était donc temps de faire connaissance avec sa plume !!!!!!!!!!!
L’auteur nous parle d’une « histoire cocasse, haute en couleur »…. C’est peu de le dire !
Nous avons affaire ici à de sacrés personnages, particulièrement celui de notre « héroïne »: Lady M.
Lady M. est une vieille femme au caractère bien trempé. Cette octogénaire coquette et épicurienne fait dans le grand banditisme: madame et son compagnon Pompilius Senaresco mettent au point des escroqueries de haut vol qui leur permettent d’amasser des millions et de mener grand train vie.
Elle va prendre sous son aile le jeune Lambert, plagiste aux Antilles, qu’elle débauche de son poste pour lui apprendre les ficelles du métier.
Vu ainsi, je dirais que le résumé n’a pas de quoi faire frémir… Et pourtant, l’histoire est captivante. On ne s’ennuie pas une minute en tournant les pages.
La force de ce récit demeure tout d’abord dans le langage de Lady M. et de Pompilius. Qu’il s’agissent de leurs mots doux ou de leurs insultes, les expressions ont quelque chose de magique et de truculent ! San Antonio fait mouche à chaque coup et nos deux obsédés s’invectivent dans un verbe où le cul se marie savamment à l’aristocratie !
Notre pittoresque Lady M. s’adresse aussi beaucoup à Dieu. Sa foi lui est indéfectible et elle lui fait le récit de toute ses pensées, ses envies, ses interrogations, ses souvenirs… Le Seigneur connait donc tout de ses histoires de cul: de la taille du « chibre », de la « bite », du « mat »,…, aux pipes qu’elle a pratiquées en passant par les positions et lieux les plus extravagants de chacune de ses histoire ! Et Dieu sait si elle en a tâté du mâle, la vieille ! Incroyable ce que cette histoire est ponctuée des réminiscences libidineuses de l’ancêtre qui tombe folle amoureuse de son « jeune dauphin » au grand dam de Pompilius qui passe en second…
Au delà des histoires de « fion », il y a de l’Amour, du vrai, avec un grand « A ». Lady M. consciente de sa descente dans la décrépitude va regretter de ne pas avoir connu Lambert plus tôt. Car elle aurait tant aimé partager les plaisirs de la chair avec son jeune éphèbe… Et c’est sans doute là que réside la noirceur de l’affaire: la fin de la vie, la vieillesse, la maladie contre qui on ne peut lutter malgré tout ce que l’on aurait envie de faire. En définitif, la Mort, plus forte que tout, vers qui l’on se dirige inexorablement…
Et, comme une touche de douceur, notre Amour qui revient nous dire qu’à tout âge, l’on peut aimer et que l’Amour n’a pas d’âge:
Lady M. est raide dingue de son jeune Lambert; tout comme ce dernier va prendre conscience de ses sentiments envers cette distinguée matriarche. Il va finir par l’aimer de façon chaste mais sincère…
Et le secret… Le lourd secret qui pèse sur cette sombre histoire de gangsters… C’est avec brio qu’il nous est révélé tout à la fin du livre… Lambert, tout comme le lecteur attentif, aura su remarquer ou se sera douté du « pot aux roses », ultime abîme de la vie fantasque de Lady M.
C’est puissant, c’est brillant, c’est plus que bien écrit, ça fait voyager et peut être même un peu rêver ! Alors n’hésitez pas à faire connaissance avec « La vieille qui marchait dans la mer »….
Publié par Wal à 08:37

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